À presque 100 ans de la naissance du peintre français hyperactif Bernard Buffet, nous ne pouvons que remarquer l’empreinte que l’artiste a laissé sur le public pendant la deuxième moitié du XX° siècle. Revenons sur un entretien que Bernard Buffet a accordé au figaro en 1992, alors âgé de 64 ans.
Bernard Buffet, l'interview
Jean-Marie Tasset, le journaliste qui mène l’entretien, commence par le sujet qui a valu à Bernard Buffet sa notoriété : sa grande productivité. Ce dernier révèle que depuis 1946, il réalise environ une œuvre tous les deux jours. Après un simple calcul, nous arrivons à un résultat approximatif de 8500 œuvres officielles, et ce sans compter les diverses illustrations et aquarelles qu’il réalise en même temps. On est en droit de se demander où se cachent ces nombreuses toiles. Bernard Buffet lui-même plaisante à ce sujet en suspectant les heureux propriétaires de conserver ses tableaux chez eux. Mais revenons sur le rythme de travail de l’artiste. Il révèle durant l’entretien qu’il peint matin et soir, avec quelques changements de ses heures de travail au fur et à mesure de sa carrière. Et à l’inverse de la grande majorité des travailleurs, il admet ne pas apprécier ses rares vacances et de ne pas se reconnaître en tant que peintre.
Bernard Buffet continue en attaquant ses ennemis de longues dates : les critiques et autres spécialistes de la peinture. Se revendiquant un artiste du peuple, il critique la vision trop académique et réductrice de ses derniers. Allant jusqu’à se comparer à certains autres artistes, il justifie la condescendance des critiques artistiques à de la jalousie par rapport à son propre succès. M. Tasset attend ce moment pour lui parler de l’Académie des Beaux-Arts et de sa position de peintre académique. Bernard Buffet ne se considère absolument pas comme tel. Il explique avoir rejoint l’Académie pour accomplir un rêve de longue date et y retrouver ses anciens mentors. L’entretien dérive sur les différents mouvements artistiques picturaux qui ont marqué la France. Bernard Buffet y déclare sa grande lassitude pour le mouvement impressionniste, parlant de « flou » le rendant malade. Il n’hésite pas à citer des noms d’artistes qu’il apprécie, notamment Manet qu’il qualifie de faux impressionnistes. Il déclare son amour pour le Baron Gros, « le premier grand peintre moderne » qu’il qualifie de « premier romantique », s’étant ôté la vie à presque 70 ans à cause d’un chagrin d’amour.
L’entretien se conclue par une question sur l’existence d’un grand projet de Buffet. Sa réponse brève ne pourrait être plus claire : « Oui. Peindre. Toujours Peindre. » Il est étrange de voir qu’une grosse partie de cet entretien est consacré au passé, de l’artiste et de l’art en général, puis, comme un signe du bref avenir qui attend Bernard Buffet, le futur de ce dernier est adressé en une question et une réponse relativement succincte. Tout comme le Baron Gros, qui vivait pour son art et ses passions, Bernard Buffet mit fin à ses jours le 4 octobre 1999, alors âgé de 71 ans, dû à la maladie de Parkinson qui l’empêchait de peindre.